L’ART DE S’ACCROCHER ET SAVOIR QUAND LÂCHER PRISE
- At septembre 01, 2021
- By Andrea Damiano
- In Gestalt
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L’attitude de ‘lâcher prise’
Dans plusieurs courants liés à la psychothérapie et au développement personnel on entend dire qu’il faut « lâcher prise », qu’il faut être cool, qu’il faut être zen, qu’il faut « s’écouter » etc, souvent formulé sous forme d’injonction non mieux spécifié et vaguement culpabilisante pour ceux qui n’y arrivent pas.
Souvent cette attitude est présentée comme la clé qui nous amènera à une forme de bien-être et de paix intérieure.
C’est une attitude qui a pu à un moment donné, il y a plusieurs années, représenter positivement une échappatoire à des injonctions trop rigides et peu respectueuses des désirs profonds de la personne. Cependant, en se développant elle a souvent pu être associée à un phénomène de « mode », et justifier des formes d’individualisme, libre de toute contrainte, voire d’oisiveté.
L’art de s’accrocher à n’importe quel prix
Sincèrement, je ne sais pas si le « whatever it takes » (à n’importe quel prix) ou l’art de s’accrocher, vendrait une seule copie si cela était le titre d’un livre…
- D’abord il faudrait s’interroger sur les raisons profondes qui nous poussent à s’accrocher ou à lâcher prise
- Ensuite, miné par une quarantaine d’années de ringardisation, le fait de ‘accrocher est vu comme lié à des attitudes bornées, avec peu de distance, têtues, typiques des personnes âgées, qui perdent de vue « l’essentiel » ou à une morale « chrétienne » de la souffrance.
- Par ailleurs, s’accrocher présente un défaut majeur par rapport au lâcher prise : c’est le risque, parfois très présent, d’être « décroché » par des évènements et des facteurs extérieurs qui dépassent notre force et notre volonté. Au moins si on lâche prise, c’est nous qui avons lâché la prise, et donc il n’y a pas de risque que quelqu’un ou quelque chose nous oblige à le faire (un peu comme dans la fable du raisin et du renard de La Fontaine, ou le renard dit que le raisin qu’il n’a pas atteint n’était pas en réalité assez mur, et donc qu’il ne valait pas la peine d’être cueilli).
- Enfin, souvent, l’objectif que nous avons poursuivi en nous accrochant est diminué, un peu comme si cela ne valait pas trop la peine de faire un tel effort (dans l’équilibre général de l’univers, c’est vrai, peut-être que cela ne vaut pas grand chose), un peu comme si nous avions fait un effort pour rien…en sapant le moral et la fierté d’un objectif atteint ou d’un travail bien fait.
La Gestalt et l’importance d’atteindre les objectifs fondamentaux
Le concept de « Gestalt achevée » est en contradiction avec cette vision des événements.
En Gestalt, le fait d’atteindre un objectif fondamental est particulièrement valorisé. Parfois à n’importe quel prix. C’est humain et normal de vouloir atteindre ses objectifs, de réaliser ses souhaits, de clore ses expériences, de mettre toutes ses chances de son coté en faisant le maximum pour ce qui est dans notre zone d’influence première, celle qui dépend de nous.
Qui n’a jamais vécu la satisfaction de réussir, de terminer une longue randonnée, ou une traversée, après plusieurs jours d’efforts très soutenus, d’avoir des réussites sportives, scolaires, familiales ou professionnelles : on sait que cela en vaut la peine et on a le sentiment que l’ on a dépassé les obstacles et surmonté les difficultés avec le cœur avant tout.
Le fait que cela a été dur, long, fatigant pour nous ajoute de la satisfaction dans la satisfaction d’avoir atteint son objectif. Et la satisfaction, c’est une forme de bonheur.
Le fait d’avoir des expériences incomplètes, inachevées ou des objectifs ou des souhaits non atteints, (gestalts inachevées) nous mine, nous parasite et nous fatigue. Cela installe une forme de frustration et de répétition dans l’échec, et nous « pompe » beaucoup plus d’énergie qu’une expérience complétée proprement, malgré les efforts importants.
Insister pour exister
Le « lâcher prise » sera une attitude bienvenue si, après avoir essayé par tous nos moyens nous n’y arriverons pas, à cause de facteurs extérieurs et impondérables… à ce moment-là seulement, le lâcher prise sera utile. Jamais avant.
Il sera utile pour ne pas trop souffrir, pour éviter de se morfondre, de passer à autre chose ou de réessayer la même chose. Il faut insister pour exister.